Numéro 3 – Octobre 2014


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Numéro 3 - Octobre 2014Le troisième numéro de la Revue française de criminologie et de droit pénal réussit, une nouvelle fois, à rassembler les contributions variées de théoriciens et de praticiens du droit pénal et de la criminologie. Vous pouvez ainsi retrouver les contributions des Pr Jean Pradel et Philippe Baumard, du criminologue Philippe Bensimon, du chercheur Jean-François Gayraud, ou encore celles des juges Béatrice Penaud et Marc Trévidic. Ce numéro traite de sujets aussi divers que les programmes correctionnels canadiens, la cybercriminalité, le nouveau capitalisme criminel, le terrorisme ou encore la responsabilité des juges.

 

Sommaire

› ARTICLES

Les programmes correctionnels au Canada : entre mythe et réalitépage 3
Philippe Bensimon

La cybercriminalité comportementale : historique et régulation page 39
Philippe Baumard

› TRIBUNES LIBRES
Un nouveau capitalisme criminel : dérégulation aveugle, géantes scènes de crimes page 77
Jean-François Gayraud

Quels juges pour quelle justice ? page 99
Jean Pradel

› NOTES
Le juge est-il irresponsable ? page 111
Béatrice Penaud

Du terrorisme d’État à la « génération Jihad » page 119
Marc Trévidic

› INFORMATIONS
Actualité du droit pénal et de la procédure pénalepage 125
Gabriel Roujou de Boubée et Jean-Philippe Loyant

 

Résumés


Les programmes correctionnels au Canada : entre mythe et réalité par Philippe Bensimon

Objet de bien des controverses, le discours entourant les programmes correctionnels au Canada recèle une telle force d’attraction que politiciens, administrateurs, cliniciens et universitaires s’y jettent corps et âme en croyant avoir enfin trouvé le remède du siècle. Candeur, naïveté, modes, courants politiques, relent de religiosité ou opportunisme, le monde n’a pourtant rien d’homogène et le crime, aussi loin que l’on puisse remonter à travers la nuit des temps, s’inscrit de plain-pied dans la nature de l’Homme. Vouloir l’éradiquer à l’intérieur même des murs relève d’une utopie alors que pour bien des professionnels, il s’agit plus d’un idéal socialisant doublé d’une véritable foi thérapeutique à transformer l’Autre. Sur le terrain, les effectifs cliniques trop souvent laissés à eux-mêmes, sont pourtant loin d’être suffisamment qualifiés et formés pour se confronter à la longue aux différentes typologies criminelles et encore moins faire contrepoids à ce qui ne relève pas d’une maladie comme beaucoup aimeraient encore le croire, mais d’un choix délibéré. Au même titre que les évaluations psychiatriques, l’expertise criminologique et les programmes thérapeutiques mis en place ne reposent sur aucune donnée biologique, quel que soit le degré de déviance de la personne condamnée, mais sur sa malléabilité. Malléabilité et obéissance suscitées par l’évaluation qui en sera faite en vue d’une éventuelle libération conditionnelle. Entre mythe et réalité, cet article tend à relativiser les résultats de ce foisonnement de programmes dits « thérapeutiques » imposés au sein des pénitenciers canadiens par ceux-là mêmes qui en vantent haut et fort les performances, sans pour autant que la moindre enquête externe n’ait été effectuée et en toute indépendance quant aux coûts et bénéfices réels alors que l’arrêt de l’agir criminel ne dépend que d’une seule et même personne : son auteur. Rarement du clinicien.

 

Mots-clefs : Face cachée du crime ; Politiques pénales ; Programmes correctionnels ; Récidive.

 

A controversial subject, discourse regarding correctional programs in Canada carries a significant weight, with politicians, administrators, clinicians and academics having finally found the right remedy. Whether this is due to candour, naïveté, political movements, a hint of religion or of opportunism, the world is in no way homogeneous and crime, as far as we can go back in history, has always been part of human nature. Wanting to eradicate crime within the prison walls while assessing recidivism is utopian, while for most of professionals, it is a socialistic ideal combined with a therapeutic genuine belief in the ability to change. In the field, clinical staff is too often left to themselves, far from being sufficiently qualified or trained to deal with various criminal typologies let alone able to counterbalance what is not a sickness or a disease, as many would like to believe, but a deliberate and conscious choice. Furthermore, similar to psychiatric assessments, criminological expertise and therapeutic programs in place are not based on any biological knowledge, regardless of the extent of the offender’s criminality, but on the malleability and obedience of offenders with an emphasis on changing the offender behaviour for parole release. Between fact and fiction, this article puts into perspective the results of the ever growing number of so-called “therapeutic” programs imposed in Canadian penitentiaries by those who loudly boast about their merits. This is without having ever been subjected to external independent investigations regarding the actual costs and benefits of the programs, so that the cessation of criminal behaviour depends on one person only – the author. Seldom the clinician.

 

Keywords : Hidden Figures of Crime ; Penal Policy ; Correctional Programs ; Re-offence.



La cybercriminalité comportementale : historique et régulation par Philippe Baumard

La régulation du cyberespace constitue un effort international où se croisent intérêts publics, privés et souverains. En analysant l’évolution historique des menaces cybernétiques et des doctrines étatiques y répondant, ainsi que le cas particulier de la régulation des contre-mesures, cet article soulève le problème de l’inadéquation du cadre de régulation face aux ruptures technologiques actuelles et à venir dans le domaine de la cyberdéfense. L’article souligne en particulier la nécessité d’ancrer la réflexion sur la régulation dans le corps des sciences cognitives et comportementales, et dans le domaine du machine-à-machine.

 

Mots-clefs : Attaques informatiques ; Contre-mesures ; Cybercriminalité ; Doctrines ; Régulation.

 

The regulation of cyberspace has grown into an international effort where public, private and sovereign interests often collide. By analyzing the history of cyber criminality and national cyber doctrines, including the particular case of the regulation of counter-measures, this article investigates the difficulty of obtaining a global agreement on the regulation of cyber warfare. A review of the motives for not adapted to the current technological change in the cyber security domain. The article suggests a paradigm shift in handling and anchoring cyber-regulation into a new realm of behavioral and cognitive sciences, and their application to machine learning and cyber defense.

 

Keywords : Cyber attacks ; Counter-measures ; Cyber criminality ; Doctrines ; Regulation.



Un nouveau capitalisme criminel : dérégulation aveugle, géantes scènes de crimes par Jean-François Gayraud

 

La finance est devenue la première industrie mondiale. La hausse vertigineuse des actifs financiers que nous connaissons est unique dans l’histoire humaine. La brutale financiarisation du monde, ainsi que la déconnexion de l’économie réelle et de la finance, est une réalité. Cette situation inédite sera aussi un phénomène durable et structurant des décennies futures. Cette mutation majeure donne naissance à un capitalisme sans entraves, car dérégulé, dont une caractéristique majeure est passée inaperçue : il est profondément criminogène, au sens où il est porteur d’incitations et d’opportunités inédites au crime. Les crimes financiers ont désormais des effets systémiques et macroéconomiques. Dans ce nouveau contexte, le diagnostic criminel fonctionne non comme un « effet de diversion » ou de « divertissement » venant consolider le système, ou encore comme une naïve « théorie du complot », mais plutôt tel un puissant révélateur de prédations aux causes et aux effets systémiques, car intriquées dans l’économie et l’architecture du système. Nous le constatons depuis les années 1980 lors des grandes crises financières issues de la dérégulation. Nous devons aussi nous interroger sur deux techniques désormais centrales dans le fonctionnement des marchés : la titrisation et le trading de haute fréquence.

 

Mots-clefs : Criminogène – Capitalisme ; Crises financières ; Dérégulation ; Financiarisation ; Titrisation – Trading de haute fréquence.

 

Finance has become the world’s largest industry. Skyrocketing financial assets that we know is unique in human history. The brutal financialization of the world and disconnected from the real economy and finance becomes a reality. This new situation will also be a lasting phenomenon and structuring future decades. This major mutation gives rise to unfettered capitalism, as deregulated, a major feature has gone unnoticed: it is deeply criminogenic in the sense that it carries incentives and unprecedented crime opportunities. Financial crimes now have systemic effects and economic macro. In this new context, the criminal diagnostic functions not as a « diversion effect » or « entertainment » from consolidating the system, or as a naive « conspiracy theory », but rather as a powerful indicator of predation causes and effects systemic as intricate in the economy and the system architecture. We see it in the 1980s during the great financial crisis from deregulation. We must also ask ourselves now two central techniques in the functioning of markets: securitization and high frequency trading.

 

Keywords : Criminogenic – Capitalism ; Financial Crisis ; Deregulation ; Financialization ; Securitization – High Frequency Trading.



Quels juges pour quelle justice ? par Jean Pradel

 

« Penser l’avenir des acteurs de l’autorité judiciaire pour renouer le lien entre citoyens et justice ». Telle était la problématique du colloque organisé par l’Institut pour la Justice au Sénat, le 3 mars 2014, sur le thème : « Quels juges pour quelle justice ? ». À cette occasion, des personnalités du monde judiciaire, réunissant des policiers, des magistrats et des avocats, des universitaires et des experts, sont intervenus au cours de différentes tables rondes : le désamour des citoyens avec la justice/avec les magistrats, moderniser la formation des magistrats, rapprocher la justice des citoyens, assurer la transparence et la responsabilité. Ce rapport synthétise le bilan qui a été dressé et les propositions qui ont été formulées au cours de cette journée d’étude et de réflexion sur la justice pénale et ses acteurs.

 

Mots-clefs : Droit comparé ; Droit des victimes ; Économie ; École nationale de la magistrature ; Expertise psychologique et psychiatrique ; Juges – recrutement ; Juges – responsabilité ; Justice pénale ; Politisation de la justice.

 

« Reflecting on the future role of judicial officers in order to reestablish the relationship between citizens and justice » was the focus of the Symposium organized by the Institute for Justice in the Senate on March 3, 2014. The theme of the conference was « What Judges for what Justice? » Presentations from legal experts, including police officers, magistrates, legal practitioners, and academics at various round tables included the following topics: the lack of confidence in the law, justice, and magistrates; the modernization of judicial training; the necessity to bring justice closer to citizens; and transparency and accountability. This report summarizes the conclusions and proposals submitted during the conference on the criminal justice system and its actors.

 

Keywords : Comparative Law ; Victims’ Rights ; Economy ; French National School for the Judiciary ; Psychological and Psychiatric Assessment ; Judges – Recruitment ; Judges – Responsibility ; Criminal Justice ; Politicization of Justice.

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